Retour, aujourd’hui, sur ce lieu que j’avais déjà visité l’an dernier.
J’ai voulu en savoir plus sur cette sainte en posant des questions un peu partout et comme les réponses concordaient souvent (à ma grande surprise) je me hasarde à raconter son histoire sous réserve de plus amples témoignages.
Il faut dire que cette histoire ne date pas d’hier et a sûrement donné lieu à des récits de légendes qui comme on le sait contiennent toujours quelques parcelles de vérité.
Cette femme vivait à la fin du 19° siècle (décédée en 1887 / 1304 de l’hégire) Dans la région, elle avait une réputation de bonté et de compassion pour ses semblables du fait qu’elle recevait des voyageurs et les nourrissait généreusement. À l’occasion, elle les soignait aussi et sa réputation allait d’oued en oued, portée souvent par le vent du désert que l’on nomme si improprement le téléphone arabe.
On dit qu’elle arrivait chez les pauvres de la région sans la moindre provision et, s’enfermant dans la cuisine, leurs préparait de succulents repas, eux qui n’avaient souvent que quelques fèves pour leur subsistance quotidienne dans leurs placards. D’où venaient toutes ces victuailles, personne ne pouvait le dire … sûrement du cœur de Ma Fatma. Son passage était toujours synonyme d’amour et de réconfort.
Comme tout être humain, simple mortel, elle fini sa vie dans ses oueds qu’elle aimait tant entre Akhfénir et El Ouatia
Avant de quitter cette Terre elle demanda à être enterrée dans l’un des trois grands oueds qui débouchent sur l’océan entre ces deux villages et elle choisi ceux du milieu …. qui pris sont nom Oued Fatma.
Les pêcheurs de la région avaient tous plus ou moins de chances lors de leurs sorties en mer. Il se partageaient quelques arpents de falaises pour pêcher la courbine (excellent poisson des côtes marocaines) et allaient aussi dans l’entré des oueds, où l’eau de la terre rentrait dans l’océan. Les pêches étaient très aléatoires mais le débouché de l’Oued Fatma était souvent l’objet de pêches miraculeuses que les hommes de la région eurent tôt fait d’attribuer à Ma Fatma qui protégeait ainsi par delà la mort, la vie de ceux qu’elle avait aidé de son vivant.
Un pêcheur en particulier bénéficiait des bienfaits de Ma Fatma qui lui était apparu en rêve, lui demandant de perpétuer sa charité en construisant une grande maison pour continuer à recevoir les gens, lui promettant au passage de toujours garantir la pêche quotidienne pour que tous les pêcheurs puissent entretenir cette maison. Au lieu de garder pour lui ce bienfait de la sainte, il décida de partager sa bonne fortune avec ses compagnons de mer. Il se mis en devoir de construire cette maison tout près de la tombe de Ma Fatma pour la remercier et l’honorer. Cette maison devait rester ouverte jour et nuit et tout le nécessaire devrait être en permanence disponible pour les gens de passage pour cuisiner et dormir. Le gîte et le couvert en quelque sorte. (vous verrez sur les images que c’est toujours le cas et j’ai pu mager une orange fraîche au milieu de ce désert)
Il rassembla quelques matériaux sur la place de son village et vaquant à ses occupations, laissa passer quelques temps pour disposer de quelques amis pour l’édification de cette maison de providence.
Vint à passer un homme sûrement mal intentionné qui convoitait les poutres et les madriers qui devaient constituer l’ossature de cette maison. Il se mit en devoir de subtiliser ces poutres et alla chercher son meilleur chameau pour les transporter. Arrivé sur place il essaya d’attacher les poutres à un attelage mais impossible de soulever ces pièces de bois Impossible de faire mettre le chameau debout, les poutres pesaient des tonnes et il n’arriva en fin de compte qu’a épuiser sa bête. Rien a faire les madriers étaient comme rivés au sol. Il alla chercher un deuxième chameau plus fort au risque de se faire repérer mais sans plus de succès. Pire, il fut la risée des hommes qui avaient vu de loin sa tentative échouer. Il était inutile d’intervenir, Ma Fatma protégeait sa future maison.
Si bien que, au matin qui suivit cette tentative de vol, on ne trouva plus trace des matériaux stockés sur la place du village … Tout s’était volatilisé dans la nuit, tout avait été transporté l’endroit où devait se construire la maison, au bord de l’oued a quelques kilomètres de là … où elle est toujours
Vint le jour de l’inauguration.
Les pêcheurs, au fond de l’oued se rassemblèrent pour fêter la nouvelle demeure de générosité. Une grande quantité de victuailles fut apportée ainsi que du vin et autres boissons de fête.
La fête battait son plein lorsqu’un saharien de passage attiré par les libations et les chants se mit en devoir de mettre fin à la fête un peu trop païenne à son goût.
Il était profondément religieux et, évidement, le vin et les chants contrevenait à son dogme rétrograde. La fête s’arrêta donc et notre foutu saharien quitta la place pour se diriger vers l’océan. Au débouché de la route une immense fatigue le pris au point qu’il s’endormi tout net sur son chameau. Une grande dame lui apparut en songe avec un air sévère et une voix de colère :
« Comment ? Tu as osé interrompre la fête que ces gens donnaient en mon honneur ?
Soit maudit si tu ne vas pas tout de suite t’excuser de ton impudence à mon égard ! »
Vous l’avez reconnue, c’était Ma Fatma qui tançait ce gredin de religieux mal embouché.
Réveillé en sursaut il fit galoper son chameau aussi vite qu’un chameau peut le faire et s’en revint s’excuser auprès des fêtards dépités par ses remontrances.
Vexé il déclina l’invitation que les pêcheurs lui firent de rester avec eux.
« Diantre je ne me mêle pas à ces pratiques licencieuses ! » dit il avec la bouche en cul de poule … à ce jour, l’affaire dure encore dans tout le pays !!! Indécrottables religieux !
Bref nous voilà quelques générations plus tard avec ce lieu toujours ouvert,
Quelques oranges, des casseroles et des bouteilles de gaz. Des coussins et des paillasses pour passer la nuit.
Tout est sur les images. La légende est encore vivante
La tombe de Ma Fatma est toujours vénérée et je lui ai demandé de vous protéger tous vous qui me lisez.
Car qui pense à Ma Fatma sera aussi l’objet de ses pensées.
Il y a un petit caillou blanc avec quelque chose dessous que j’ai déposé pour vous tout près de sa pierre tombale, regardez l’image il est là le petit caillou avec toutes mes pensées.
Un arbre a poussé à ses pieds et aimablement depuis des années il pousse ses feuilles au dessus de sa sépulture pour lui faire de l’ombre. Je crois bien que c’est le seul arbre de toute la vallée où pour ma part je n’ai vu que des buissons.
D’après ce qu’on m’a dit personne ne l’a planté. Probablement un oiseau du ciel passant par là aura laissé tombé une graine … comme par hasard … à cet endroit précis.
De nombreuses tombes l’entourent comme pour être plus près d’elle dans la vie éternelle, sûrement ceux qui n’ont pas eu leur part sur la Terre et qui peuvent ainsi être nourris de son amour dans l’au delà.
Ainsi se perpétue l’histoire de Ma Fatma. Si vous lisez ceci et que vous avez d’autres anecdotes ou des choses plus historiques sur cette grande dame, je suis preneur. Et n’hésitez pas à me reprendre si j’ai dit une bêtise.
Les légendes sont de belles bêtises et celle ci contient assez d’amour pour me les pardonner toutes.
Bises à tous
L’album photo :
