Le sheykh Bûbakr un jour, entouré de disciples
Sortit de son couvent, juché dessus son âne
Et tandis qu’il allait suivi de tous ses gens
Soudain, l’âne en question lâcha un vent bruyant
Ce pet mit le grand sheykh dans un état d’extase
Il se mit à hurler, il déchira sa robe
Les témoins de la scène, disciples ou bien badauds
N’apprécièrent guère de voir le maître ainsi
Et quand il fut calmé, l’un d’eux s’ouvrit à lui :
« Que t’est-il arrivé ? Quelle était cette extase ? »
Lorsque j’ai regardé, lui répondit le sheykh
Là, tout autour de moi, cette mer de disciples
Lorsque j’ai vu leur nombre devant et derrière moi
Je me dis en moi-même que je n’étais pas moins
Que le grand Bâyazîd. Et que comme aujourd’hui
Auréolé de gloire, aimé de mes disciples
Je me rendrai demain avec tous les honneurs
Fier et la tête haute, à la Resurrection
A peine cette pensée traversa mon esprit
Que mon âne lâcha ce bon pet bien bruyant
Me signifiant ainsi qu’être gonflé d’orgueil
Ne mérite en réponse que le vent du mépris
Grâce à l’âne mon âme fut soudain embrasée
Et une extase vint de cet état de fait. »
Tant que tu garderas cet orgueil insensé
Tu resteras très loin, loin de la vérité
Bouscule ton orgueil, brûle ton arrogance
Ton ego est au centre : mets le feu à ce moi!
Tu changes à chaque instant de couleur et de forme
Mais dans toutes tes fibres, un Pharaon est là
Tant qu’il reste de toi un atome de toi
Tu seras dans ton être hypocrite au centuple »
……
Le quantique des oiseaux
Attar
